L’hebdo qui pique ?

Un article traitant de la motivation à refuser la vaccination anti-Covid-19 est paru dans l’hebdomadaire Moustique 1« Dans la tête des antivax » par Philippe Lambert, Moustique, 07/02/2024, pages 24-27, un article basé sur un livre et une interview des professeurs de Psychologie sociale Olivier Klein (ULB) … Continue reading. Cet article est consternant sur le plan scientifique car truffé d’erreurs dans les domaines de la virologie, de l’immunologie et de l’épidémiologie, ainsi que d’amalgames et d’approximations de toutes sortes.

Vaccins, tous pareils ?

On y découvre d’emblée une confusion entre, d’une part, les vaccinations antivirales maîtrisées et pratiquées depuis des décennies, bien connues en tant que succès incontestables de santé publique dans la prévention des infections dangereuses et conférant une immunité durable, et d’autre part, les vaccinations anti-Covid-19 qui sont des cas particuliers basés sur la technologie des ARN messagers ou celle de l’ADN en virus vecteur. Les premières consistent à inoculer un immunogène  (c’est-à-dire une molécule déclenchant une réponse immunitaire), les secondes consistent en l’ administration d’un précurseur génétique 2L’ARN messager utilisé pour les vaccins Pfizer et Moderna, comme l’ADN utilisé dans les vaccins Astra-Zeneca et Johnson & Johnson, sont des précurseurs génétiques d’immunogènes, au … Continue reading qui génèrera une protéine dont on sait aujourd’hui qu’elle est toxique et dont les effets peuvent varier considérablement d’une personne à une autre 3https://www.mdpi.com/2227-9059/11/8/2287 .

Antivax ?

« L’attitude et les campagnes des antivax sont scientifiquement infondées et le plus souvent empreintes de désinformation ». Déclaration péremptoire qui confond ceux qu’on appelait antivax jusqu’en 2020 et qui refusaient toute vaccination en la considérant comme un acte anti naturel et ceux qui, à partir de 2020, face aux incertitudes inouïes concernant les vaccins à précurseur génétique, s’opposent à un usage inconsidéré, une propagande mensongère et un manque criant d’informations scientifiques à leur sujet 4https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10810638/.

Complotistes ?

Qui refuse la vaccination anti-Covid-19 ? « Des gens qui embrassent des théories complotistes pour justifier leur opposition alors que la cause ne serait parfois que l’effroi inspiré par l’idée de l’intrusion d’une seringue [sic] dans leur corps ». Il s’agit ici d’un fantasme qui néglige complètement les nombreuses personnes pourtant très compétentes qui refusent la vaccination anti-Covid pour des raisons rationnelles, documentées et reposant sur des travaux scientifiques tout à fait sérieux. 

Ces deux dernières assertions péremptoires : “Antivax” et “Complotistes”, ne sont ni plus ni moins que des stratagèmes mis en place pour couper court à toute argumentation. C’est le Stratagème 32 que décrit Schopenhauer dans “L’art d’avoir toujours raison” 5Le stratagème 32, intitulé « La diversion », consiste à détourner l’attention de l’auditoire de la question en débat vers un sujet connexe, mais plus facile à défendre. Ainsi, … Continue reading.

Une technologie éprouvée ?

Vient ensuite une affirmation fausse commençant par un fait exact : « la technique des vaccins à ARN était déjà à l’essai depuis des années, notamment en cancérologie » 6Comme en attestent, par exemple, cet article d’une équipe belge en 2007 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17932806/ ou une revue détaillée en 2015 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25263094/. Toutefois, ce qui échappe complètement à l’intervenant, c’est que la thérapie génique anti-cancer, destinée à des malades incurables par d’autres techniques thérapeutiques, n’a rien à voir avec une prophylaxie vaccinale anti-infectieuse destinée à des personnes saines. Les risques encourus doivent être mesurés à une aune très différente dans les deux cas.

Les vaccins les plus testés de l’Histoire ?

« De toute l’histoire de la Médecine, les vaccins contre la Covid-19 sont d’ailleurs probablement ceux qui ont été le plus testés – des dizaines de milliers de volontaires – avant leur mise sur le marché ». Cette déclaration reprend une des erreurs de raisonnement les plus flagrantes de cette pandémie. En effet, on ne peut en aucun cas compenser, pour les essais de fiabilité et sécurité cliniques, le manque de temps par le nombre. Acheteriez-vous une nouvelle voiture dotée d’un nouveau type de moteur qui aurait été testé sur une distance de 100 km et sur un million de véhicules (100 millions de km) ? Ou préféreriez-vous peut-être que le constructeur ait testé 500 véhicules sur 200.000 km (100 millions de km) ? L’information que l’on obtient de ces deux types de tests ne permettra absolument pas de tirer les mêmes conclusions à propos de la fiabilité et de la sécurité à moyen ou long terme. Rien ne remplace la durée pour un questionnement sur le long terme, et certainement pas le nombre. Or les vaccinations, quelles qu’elles soient, ne présentent pas que des risques immédiats, beaucoup d’effets potentiels des vaccins tels que de l’auto-immunité 7https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36910517/ ou un cancer 8https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/38234925/ peuvent se manifester bien plus tard 9. Généralement, les vaccins sont développés en dehors d’une période de crise épi- ou pandémique, lorsque l’urgence ne domine pas tout.

En outre, dans les essais cliniques de Pfizer, les volontaires ayant reçu le placebo se sont vus rapidement offrir l’arrêt prématuré de l’expérience ainsi qu’une vaccination 9https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8461570/, ce qui a empêché tout contrôle sur le moyen et le long terme.

Il faut également signaler, à propos de la sécurité, parmi d’autres exemples surprenants, le fait que Pfizer n’a pas divulgué publiquement l’exclusion des femmes enceintes de son essai clinique et que cela ne l’a pas empêché d’affirmer l’inoccuité de son vaccin anti-Covid-19 administré pendant la grossesse 10https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7745181/.

Seringophobie ?

Par ailleurs, l’analyse des psychologues concernant le refus de la vaccination réduit la motivation à « une phobie de la piqûre », ou à des horaires incompatibles ou encore à la fracture numérique. C’est un peu mince. Que le refus soit plutôt dû au caractère sommaire de l’évaluation des risques et au danger de l’utilisation incontrôlée de ce qui s’avère être somme toute un précurseur génétique de vaccin, ainsi qu’ au manque de confiance vis-à-vis d’une technologie nouvelle manifestement bâclée 11https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10810638/, n’est pas évoqué. Pas plus que l’influence de nombreux scientifiques compétents qui ont dénoncé d’emblée les nombreuses failles du développement d’une vaccination reposant sur des principes encore inexplorés dans le cadre d’une prévention vaccinale, et dont on assimile les réserves à un « antivaxisme » primaire qui ne leur correspond pas du tout. Entre une pro-action téméraire et sans frein, et une peur immodérée du progrès, il existe une position intermédiaire, rationnellement justifiée mais que l’article n’envisage même pas: une prudence scientifiquement légitime.

Des biais en sens unique ?

Le suivi de l’épidémie dépend d’une pharmacovigilance passive et dont la plupart des scientifiques reconnaît aujourd’hui la grande faiblesse, qui n’est d’ailleurs pas une nouveauté 12Hazell L, Shakir SA. Under-reporting of adverse drug reactions : a systematic review. Drug Saf. 2006;29(5):385-96. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16689555/. Laissée au bon vouloir (et à la disponibilité) du médecin en charge, elle faillit grandement à fournir à l’analyse statistique les éléments nécessaires à une surveillance post-vaccinale sérieuse. Il est donc vrai qu’une grande subjectivité domine les raisonnements mais cette subjectivité se manifeste autant dans une surveillance déficiente que chez un public sensible aux anecdotes. Les biais déformants dénoncés dans l’article (biais narratif : généralisation de cas individuels, d’optimisme, de ‘santéisme’, de ‘scientisme’, de véracité, de confirmation, de regret anticipé, d’exposition sélective) se manifestent en réalité dans un « camp » comme dans l’autre, ce qui ne permet pas de décider duquel a raison…. Rappelons également qu’à l’inverse de ce qui est affirmé par les auteurs à propos d’un biais d’optimisme, les premiers sondages soulignaient que les individus avaient davantage tendance à surestimer les risques infectieux et la létalité (jusqu’à 300 fois en Allemagne) du Covid 13A propos d’enquête d’opinion, consultez ceci : https://www.kekstcnc.com/media/2793/kekstcnc_research_covid-19_opinion_tracker_wave-4.pdf

On découvre tard les effets non-désirés ?

Toute décision vaccinale doit se fonder sur une comparaison entre les bénéfices et les risques et coûts attendus. Pour ce qui concerne les risques, des statistiques de surveillance passive ont été publiées sur les effets secondaires graves dès 2021 et ont fait ressortir des signaux d’alerte précoces (thromboses avec le vaccin Astra-Zeneca 14https://www.ema.europa.eu/en/news/astrazenecas-covid-19-vaccine-ema-finds-possible-link-very-rare-cases-unusual-blood-clots-low-blood-platelets, myocardites et péricardites chez les jeunes hommes avec les vaccins Pfizer et Moderna 15https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/70/wr/mm7027e2.htm 16https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10216497/…), régulièrement confirmés par la suite et dont la causalité probable a d’ailleurs été reprise depuis lors dans les notices des différents vaccins. Pour ce qui concerne les bénéfices, des statistiques sur les infections à SARS-CoV-2 ont été publiées dès 2020  et ont progressivement montré l’absence de danger pour les individus jeunes et en bonne santé, par exemple, en juin 17https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(20)30243-7/fulltext, en juillet 18 … Continue reading ou en décembre 2020  19https://link.springer.com/article/10.1007/s10654-020-00698-1.

Une stratégie de persuasion ?

Enfin, la présentation des moyens de persuasion en faveur d’une vaccination particulière 20Rappelons bien que chaque vaccination est différente, tout particulièrement celle-ci qui repose sur des principes de biologie moléculaire différents de toutes les autres et ne peut donc y être … Continue reading et qui fait appel à l’exemple que doivent donner les personnes influentes – et en particulier le personnel soignant, en se faisant notoirement vacciner, alors que le sujet est loin de faire l’unanimité 21https://www.bmj.com/company/newsroom/should-covid-19-vaccination-be-mandatory-for-health-and-care-staff/ – est inquiétante car, comme toute propagande, elle est basée sur la préconception qu’elle est juste et bonne, dogmatiquement.

Notes

Notes
1 « Dans la tête des antivax » par Philippe Lambert, Moustique, 07/02/2024, pages 24-27, un article basé sur un livre et une interview des professeurs de Psychologie sociale Olivier Klein (ULB) et Vincent Yzerbyt (UCLouvain)
2 L’ARN messager utilisé pour les vaccins Pfizer et Moderna, comme l’ADN utilisé dans les vaccins Astra-Zeneca et Johnson & Johnson, sont des précurseurs génétiques d’immunogènes, au sens où il s’agit de molécules d’acide nucléique, donc d’informations génétiques qui, une fois incorporées dans des cellules indéterminées de la personne vaccinée, donneront à ces cellules l’ordre de synthétiser une protéine immunogène, sans que quiconque puisse avoir un contrôle sur les doses qui seront effectivement produites, ni sur la durée du processus.
3 https://www.mdpi.com/2227-9059/11/8/2287
4, 11 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10810638/
5 Le stratagème 32, intitulé « La diversion », consiste à détourner l’attention de l’auditoire de la question en débat vers un sujet connexe, mais plus facile à défendre. Ainsi, la personne qui utilise ce stratagème peut éviter de répondre directement à l’argument de son opposant. Ce livre présente une liste de stratagèmes pour convaincre en public. Schopenhauer y expose des techniques de rhétorique visant à avoir le dessus dans une discussion, indépendamment de la vérité. https://www.schopenhauer.fr/oeuvres/fichier/l-art-d-avoir-toujours-raison.pdf
6 Comme en attestent, par exemple, cet article d’une équipe belge en 2007 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17932806/ ou une revue détaillée en 2015 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25263094/
7 https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36910517/
8 https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/38234925/
9 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8461570/
10 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7745181/
12 Hazell L, Shakir SA. Under-reporting of adverse drug reactions : a systematic review. Drug Saf. 2006;29(5):385-96. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16689555/
13 A propos d’enquête d’opinion, consultez ceci : https://www.kekstcnc.com/media/2793/kekstcnc_research_covid-19_opinion_tracker_wave-4.pdf
14 https://www.ema.europa.eu/en/news/astrazenecas-covid-19-vaccine-ema-finds-possible-link-very-rare-cases-unusual-blood-clots-low-blood-platelets
15 https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/70/wr/mm7027e2.htm
16 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10216497/
17 https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(20)30243-7/fulltext
18 https://www.nature.com/articles/s41586-020-2521-4?utm_source=Global+Health+NOW+Main+List&utm_campaign=14ea88643b-EMAIL_CAMPAIGN_2020_07_08_03_31&utm_medium=email&utm_term=0_8d0d062dbd-14ea88643b-865935
19 https://link.springer.com/article/10.1007/s10654-020-00698-1
20 Rappelons bien que chaque vaccination est différente, tout particulièrement celle-ci qui repose sur des principes de biologie moléculaire différents de toutes les autres et ne peut donc y être assimilée.
21 https://www.bmj.com/company/newsroom/should-covid-19-vaccination-be-mandatory-for-health-and-care-staff/

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