- Introduction
A l’heure où le GEMS, le RAG, le commissariat corona et les responsables politiques reparlent de baromètre pour décider de critères, de seuils, de niveaux, en vue de systématiser la gestion d’une crise épidémique 1https://www.lalibre.be/belgique/societe/2022/01/05/la-belgique-au-stade-maximal-du-projet-de-barometre-corona-2HATSYMIVZHX7EAO2XT6PB6QBI/, il nous paraît important de rappeler quelques principes de base pré-existants en santé publique par rapport aux épidémies de maladies respiratoires, de les confronter à la situation présente, dominée par le variant Omicron, et d’en tirer les leçons et conclusions pour l’avenir.
Notons cependant que nous n’aborderons ici que les indicateurs liés à la présence et aux répercussions du virus en lui-même dans la population, mais que la gestion de la crise sanitaire doit être beaucoup plus large comme discuté par ailleurs 2https://covidrationnel.be/2022/01/12/gestion-de-la-crise-covid-19-il-est-grand-temps-de-changer-de-paradigme/.
- Comment les épidémies de maladies respiratoires étaient-elles gérées par le passé?
Sciensano le documente pour l’exemple de la grippe saisonnière : https://epidemio.wiv-isp.be/ID/diseases/Pages/Influenza.aspx
(Notons d’emblée qu’il ne s’agit pas ici de comparer grippe et Covid-19 du point de vue médical, mais d’analyser différents principes de gestion et de suivi d’une épidémie.)
Nous y apprenons que “Depuis 2007, le réseau sentinelle des médecins généralistes enregistre en continu les consultations en médecine générale pour les syndromes grippaux et les infections aiguës des voies respiratoires”, et que “[le] seuil épidémique se définit comme le nombre minimal de consultations pour syndromes grippaux par semaine et par 100.000 habitants, enregistrés par le réseau des médecins vigies … Cette année, le seuil est fixé à 128 consultations pour 100 000 habitants en Belgique.” (par semaine)
En outre, “[le]… Centre National de Référence … pour l’Influenza teste des échantillons cliniques collectés d’une part dans le cadre de la surveillance des syndromes grippaux, par le réseau de médecins généralistes vigies et de la surveillance des infections respiratoires aiguës sévères (SARI) par un réseau d’hôpitaux vigies, et d’autre part, il teste des échantillons prélevés en dehors du contexte d’une surveillance.”
Enfin, “[la] surveillance vise à suivre : la durée et l’intensité de l’épidémie annuelle de grippe saisonnière, les virus circulants (types, sous-types, caractéristiques antigéniques et génétiques), l’impact et la sévérité, la résistance aux antiviraux, l’effectivité vaccinale.”
Cette surveillance ne se limite pas aux différents virus responsables de la grippe (influenza), mais concerne aussi les autres virus (dont les coronavirus préexistants, rhinovirus, adénovirus divers, etc.) et les autres maladies respiratoires transmissibles.
Une telle stratégie est bien en cours de discussion et d’étude dans plusieurs pays comme l’Espagne 3https://www.7sur7.be/dossier-pandemie-de-coronavirus/l-espagne-veut-considerer-le-covid-19-comme-une-grippe~ac756409/?utm_source=twitter&utm_medium=social&utm_campaign=socialsharing_web, par des experts en Angleterre 4https://archive.ph/2022.01.08-211417/https://www.theguardian.com/world/2022/jan/08/end-mass-jabs-and-live-with-covid-says-ex-head-of-vaccine-taskforce, en Belgique 5https://www.7sur7.be/sante/avec-omicron-lepidemie-se-rapproche-de-celle-de-la-grippe-estime-marc-van-ranst-br~a538a64f/ et par diverses institutions internationales 6https://www.lalibre.be/belgique/societe/2022/01/11/omicron-va-faire-sortir-le-covid-19-de-la-phase-pandemique-estime-lema-S4C3BLLCQFFMVPIBE2TZM5KH3A/ , … Continue reading.
2. Quelles sont les différences entre les indicateurs utilisés pour le SARS-CoV-2 et les autres maladies respiratoires ?
a) La différence principale réside dans le suivi des contaminations attribuées au SARS-CoV-2 — dites COVID — par une stratégie de tests PCR pour la détection du virus, et non par la reconnaissance des symptômes et signes cliniques de la maladie elle-même par un médecin. Or, nous savons qu’un test PCR peut être positif alors que la charge virale est faible, non infectieuse et non contagieuse 7https://covidrationnel.be/2021/05/28/pour-une-strategie-de-depistage-efficace-et-objective-des-personnes-susceptibles-de-transmettre-le-sars-cov-2/ et qu’en moyenne, 40% des contaminations au SARS-CoV-2 ne génèrent pas de symptômes 8Global Percentage of Asymptomatic SARS-CoV-2 Infections Among the Tested Population and Individuals With Confirmed COVID-19 Diagnosis: A Systematic Review and Meta-analysis | Global Health | JAMA … Continue reading. Un certain nombre de cas et d’hospitalisations labellisées COVID et comptabilisées comme telles, le sont donc pour un test positif et pas pour les effets de la maladie, surtout chez les enfants 9https://francais.medscape.com/voirarticle/3608016?uac=411565MN&faf=1&sso=true&impID=3941551&src=WNL_mdplsfeat_220112_mscpedit_fr#vp_2.
Ainsi, pour la semaine 52 de 2021, Sciensano a recensé 82.486 tests positifs au SARS-CoV-2 en Belgique, soit une incidence de 711 pour 100000. Pour la même semaine, le “Bulletin hebdomadaire infections respiratoires” de Sciensano 10https://epidemio.wiv-isp.be/ID/diseases/SiteAssets/Pages/Influenza/WeeklyBulletinRespiratoryInfections.pdf mentionne, lui, une incidence de 178 consultations auprès d’un généraliste pour 100.000 habitants par semaine. En comptant les consultations téléphoniques, le nombre moyen de contacts quotidiens avec un généraliste pour suspicion de COVID était, lui, d’environ 70 pour 100.000 habitants, soit 500 par semaine; 54% des patients pour lesquels un premier test a été demandé par les médecins vigies se sont révélés positifs pour le SARS-CoV-2.
Le même bulletin nous enseigne que “[l’]’incidence hebdomadaire des admissions à l’hôpital en raison d’une infection respiratoire aiguë sévère est restée stable à 2,7 admissions pour 100000 habitants au cours de la semaine 50. Outre le SARS-CoV-2, principalement l’entéro/rhinovirus et VRS (bronchiolite) ont été détectés ces dernières semaines. Les chiffres ne concernent que les personnes hospitalisées en raison de certains symptômes bien définis (fièvre et toux ou dyspnée) et ne comprennent pas tous les patients hospitalisés chez qui ces virus ont été détectés”. Cela représente 313 admissions de patients symptomatiques en une semaine. Le rapport nous indique (p. 8) que parmi celles-ci, sur la saison 2021-2022, 40% sont directement associées au SARS-CoV-2, 60% à d’autres virus chez les adultes, alors que les admissions pour infections respiratoires dues au SARS-CoV-2 sont beaucoup plus rares chez les enfants. En comparaison, Sciensano rapporte 1375 admissions avec un test PCR positif pour la semaine 50 de 2021.
Il ne s’agit pas ici de comparer précisément les deux sources de chiffres, mais d’observer le biais potentiel important introduit par la non-calibration du seuil de positivité des tests PCR par rapport aux symptômes réels du COVID-19, ainsi que la non-reconnaissance du fait qu’être positif au SARS-CoV-2 n’implique pas nécessairement d’être malade du COVID-19.
b) Compte tenu de ce biais potentiel, que donnent les chiffres globaux sur une année d’épidémie considérée de manière standard d’octobre à septembre ?
Le site suivant 11https://www.belgiqueenbonnesante.be/fr/etat-de-sante/maladies-transmissibles/grippe-et-syndrome-grippal nous informe que:
- en moyenne, environ 600.000 personnes sont atteintes d’un syndrome grippal chaque année en Belgique ;
- ces symptômes comprennent habituellement de la fièvre, des frissons, une sensation de malaise, une toux sèche, une perte d’appétit, des courbatures et des nausées ;
- environ 2% à 3% des personnes atteintes de la grippe sont hospitalisées;
- la durée moyenne de séjour pour une grippe sévère est de 8,8 jours (variant de 3,6 jours chez les 0-4 ans à 13,3 jours chez les personnes âgées de 85 ans et plus).
Pour le variant Delta du SARS-CoV-2, Sciensano recense, sur la base des tests PCR, du 1er octobre 2021 au 31 décembre 2021, 885.000 tests positifs, 17.000 admissions à l’hôpital, soit 2%, avec des durées médianes d’hospitalisation de 2 à 3 jours pour les moins de 5 ans et de 10 à 12 jours pour les plus de 80 ans. Pour la 1ère semaine de janvier 2022, avec la dominance du variant Omicron, le taux d’hospitalisation apparaît réduit de moitié; en accord avec les observations disponibles dans les pays où le variant Omicron s’est développé plus rapidement (Royaume-Uni et Danemark notamment), les symptômes de la maladie due à ce variant apparaissant moins graves et limités aux voies respiratoires supérieures 12https://www.nature.com/articles/d41586-022-00007-8?utm_source=Nature+Briefing&utm_campaign=28aaf2adb7-briefing-dy-20220106&utm_medium=email&utm_term=0_c9dfd39373-28aaf2adb7-45689842 .
3. Quelles leçons en tirer pour la définition d’un baromètre de suivi et gestion d’une épidémie future ?
La sélection de critères et chiffres seuil pour définir un “baromètre” de la situation épidémique et des niveaux et mesures systématisées de gestion de crise est une entreprise complexe, qui peut vite devenir disproportionnée par rapport à une situation sanitaire très changeante.
Différents exemples ont déjà été proposés dans le passé et n’ont pas été mis en application ou ont été abandonnés assez rapidement (nous en avons discuté 13https://covidrationnel.be/2021/02/05/situation-epidemiologique-de-la-belgique-dans-le-barometre-de-loms/).
La grande difficulté, comme nous l’avons vu ci-dessus, réside dans le fait que la plupart des indicateurs chiffrés sont biaisés par la stratégie de testing et ses variations successives 14https://covidrationnel.be/2021/04/08/cas-positifs-taux-de-positivite-et-indications-de-test-les-biais-lies-a-la-strategie-de-testing-rendent-les-comparaisons-entre-tranches-dage-tres-peu-fiables/. C’est principalement le cas des incidences des cas positifs et du taux de positivité, ainsi que des paramètres qui en sont tirés, comme le taux de reproduction.
Il faut absolument bien comprendre ici que le nombre de “cas” positifs est non-représentatif car ces “cas” sont détectés par PCR sans calibration sur le seuil d’infection et calculés sur 2 semaines, c’est-à-dire une fenêtre de temps supérieure à la durée de contagiosité. Si nous utilisions comme seuil de décision un nombre de “cas” positifs par PCR inférieur à l’incidence standard de faible activité de la grippe (128 consultations/semaine/100.000 habitants), nous serions ainsi condamnés à rester en situation de gestion de crise annuelle, voire perpétuelle. À titre de comparaison, nous nous mettrions dans une situation analogue à celle qui consisterait à décider de multiplier les tests PCR pour la grippe durant l’été: nous constaterions (avec le coût économique et social élevé que cette mesure impliquerait) que le virus circule en période estivale, même si très peu de gens en sont malades à cette époque de l’année. A nouveau, pour rappel, la PCR est un outil utile pour les études épidémiologiques et non pour la détection individuelle d’une contagiosité.
De même, il ne serait pas pertinent non plus de se baser sur des taux de positivité et de reproduction (qui sont par ailleurs affectés par les biais des tests PCR) avec une stratégie de tests orientée sur les personnes les plus susceptibles d’être positives. Ce modus operandi ne correspondrait en effet en rien à une surveillance de type sentinelle, effectuée sur un échantillon représentatif de l’ensemble de la population 15https://covidrationnel.be/2021/09/01/pour-une-rationalisation-des-protocoles-de-depistage-du-sars-cov-2-et-leur-adaptation-a-la-situation-epidemique/, méthode qui a pourtant démontré depuis longtemps ses preuves en santé publique.
En prenant pour norme le baromètre actuellement en discussion en Belgique, la situation présente serait classée au niveau maximal, rouge, “lorsque l’on dépasse les 150 nouvelles hospitalisations par jour, que le seuil des 500 lits occupés par des patients Covid en soins intensifs est dépassé, avec un taux de reproduction (Rt) supérieur ou égal à 1,3 et un taux d’incidence des infections sur 14 jours supérieur ou égal à 500 contaminations pour 100.000 habitants”. 16 … Continue reading
Or, si nous choisissions de prendre pour référence le baromètre de l’OMS (que nous avons présenté dans une publication précédente 17https://covidrationnel.be/2021/02/05/situation-epidemiologique-de-la-belgique-dans-le-barometre-de-loms/, nous serions beaucoup plus proches du premier niveau d’alerte de ce baromètre (niveau jaune), qui correspond à:
- moins de 5 nouvelles hospitalisations dues au COVID-19 pour 100.000 habitants par semaine (moyenne sur deux semaines), soit 580 pour 11,6 millions de Belges. C’est l’indicateur objectivement le plus fiable. Nous en sommes, en janvier 2022, à environ 1200 admissions par semaine de patients porteurs du SARS-CoV-2. D’après le rapport discuté au point 2, ce chiffre pourrait correspondre à moins de 580 personnes admises par semaine à l’hôpital pour cause d’un état clinique dégradé dû au Covid-19, en Belgique, en janvier 2022 ;
- une “capacité de riposte” suffisante définie principalement par une occupation de moins de 25% des lits de soins intensifs et une létalité en baisse, ce qui est le cas actuellement en Belgique, avec moins de 500 patients Covid en soins intensifs, c.-à-d. sous le seuil précédemment fixé pour réduire les mesures de restrictions 18https://www.7sur7.be/belgique/lobjectif-des-500-patients-en-soins-intensifs-pourrait-etre-atteint-fin-mai~aa69310f/ ;
- un nombre de décès attribués au Covid-19 pour 100.000 habitants et par semaine (moyenne sur deux semaines) inférieur à 1. Le chiffre actuel est en constante diminution en Belgique, à moins de 1,15 en janvier 2022.
Les indicateurs les plus fiables restent donc les hospitalisations, l’occupation des soins intensifs et les décès résultant du Covid-19.
4. Quelles mesures efficaces à mettre en place dans la situation actuelle avec le variant Omicron ?
Sans considération ici des biais sur les indicateurs, le niveau 1 du baromètre OMS conseille dans notre cas 19https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/336653/WHO-2019-nCoV-Adjusting_PH_measures-2020.2-fre.pdf?sequence=1&isAllowed=y de :
- maintenir les mesures de base (comme les gestes barrières de précaution individuelle) et un système fiable de surveillance ;
- communiquer des informations claires pour le grand public sur ce qu’il faut faire en cas de symptômes et qui contacter pour avoir des conseils, se faire tester ou traiter ;
- implémenter des mesures efficaces autour des clusters et des lieux clos, bondés, avec une perturbation limitée et passagère de la vie sociale et économique. Notamment, les activités et services quotidiens, comme l’éducation, les entreprises, les loisirs et le tourisme, peuvent rester ouverts avec des mesures pour limiter le risque de propagation ;
- mettre en place des mesures pour protéger les plus vulnérables en veillant plus particulièrement à ce que des précautions appropriées soient prises dans les structures de soins.
Comment décliner les recommandations que nous venons de souligner, avec les connaissances et observations dont nous disposons en janvier 2022 ?
a) Mettre en place un système fiable de surveillance revient au suivi de type sentinelle déjà évoqué ci-dessus :
- confier aux médecins généralistes le recensement des consultations symptomatiques ;
- s’appuyer sur les tests aléatoires (c.-à-d. distribués dans toute la population de manière représentative) qui permettent de mesurer la charge virale réellement présente dans la population. Notons qu’un tel sondage pourrait par exemple se faire au niveau des écoles et de l’enseignement supérieur, ce qui permettrait de garder ouverts en toutes circonstances ces secteurs essentiels, tout en les transformant en un véritable outil de mesure scientifique et citoyenne ; L’Université de Liège pratique d’ailleurs un tel suivi avec des tests PCR salivaires, sur les membres de son personnel et ses étudiants, montrant sur un échantillon de plus de 1000 personnes par semaine, des taux de positivité d’un ordre de grandeur inférieur à ceux mesurés par Sciensano 20https://www.coronavirus.uliege.be/cms/c_14106329/fr/coronavirus-resultats-du-tableau-de-bord ;
- suivre l’évolution populationnelle de la charge virale au jour le jour et ainsi anticiper sa recrudescence éventuelle.
b) Protéger les personnes à risque de formes sévères de Covid-19 (âgées ou avec comorbidité qui représentent, vaccinées ou non, environ 80% des hospitalisations, 90% des admissions en soins intensifs et 95-99% des décès Covid 21https://covidrationnel.be/2021/11/29/covid-19-et-reduction-du-risque-dhospitalisation-pour-une-strategie-ciblee-sur-la-base-des-profils-cliniques-des-malades/). À cette fin, il convient de:
- mettre tout d’abord fin aux consultations téléphoniques des médecins généralistes, prioritairement pour les patients à risque et/ ou symptomatiques, et revenir à l’auscultation et la prise en charge clinique précoce des patients à domicile ;
- former les médecins généralistes moins expérimentés cliniquement aux potentialités démontrées des soins ambulatoires précoces 22https://kce.fgov.be/fr/soins-ambulatoires-aux-patients-covid-19-dans-le-contexte-d%E2%80%99une-saturation-des-h%C3%B4pitaux-belges, … Continue reading qui permettent, dans de nombreux cas, d’éviter la dégradation au domicile de l’état de santé de patients malades de la Covid-19, et de réduire substantiellement le nombre des admissions hospitalières ;
- permettre au médecin généraliste de poser avec son patient la pertinence d’un schéma vaccinal adapté à son bilan de santé, sur la base de l’établissement médical et scientifique d’une balance bénéfices-risques, et du consentement libre et éclairé du patient dans le respect des principes de base du droit des patients ;
- dépister les personnes à risque qui s’ignorent, les mettre en contact avec un médecin traitant, analyser et booster leur immunité de base, … bref, remettre en place une politique complète de santé publique. À cette fin, la logistique des centres de tests et de vaccination pourrait être reconvertie en une politique de centres de relais médicaux renforçant l’accès à la médecine de proximité pour les populations qui en sont aujourd’hui éloignées.
c) Former la population à mettre en œuvre de bonnes pratiques de ventilation ou aération des lieux fermés, notamment par une bonne utilisation des détecteurs de CO2.
De nombreuses études ont démontré l’efficacité remarquable d’une telle mesure pour réduire drastiquement les risques de transmission et de contamination virales dans les espaces intérieurs 23https://covidrationnel.be/2021/12/04/a-propos-de-lefficacite-des-aerations-et-ventilations-pour-juguler-les-risques-epidemiologiques-en-lieux-clos/…. Maintenir le taux de CO2 à moins de 1200 ppm permet de réduire le risque de transmission virale en lieu clos de près de 99%, un effet remarquable en comparaison avec les efficacités bien moindres de toutes les autres mesures essayées jusqu’à présent. L’expliquer, de manière pédagogique, permettrait de dédramatiser, sortir par le haut de la peur et de la crise.
d) Eviter la propagation virale dans les lieux de soins, ou d’autres clusters potentiels, là où les mesures de base précédentes seraient insuffisantes en cas de reprise épidémique, la solution la plus efficace réside dans une stratégie de testing rapide (tests antigéniques) à même de détecter en temps réel les personnes potentiellement contagieuses, et donc de les écarter immédiatement pendant le temps strictement nécessaire, selon un protocole ciblé, adapté à chaque situation 24https://covidrationnel.be/visuels-didactiques/. En tout état de cause, il est essentiel que nous sortions aujourd’hui d’une stratégie de gestion de crise qui étend les mêmes mesures à de vastes secteurs, voire à toute la population, telles que confinements ou restrictions généralisés, quarantaines, vaccination massive, testing PCR systématique (aujourd’hui trop lent, inefficace et arbitraire), “Covid Safe Ticket” partout et en tout temps (contre-productif, liberticide et discriminatoire), etc., pour s’engager dans une gestion ciblée sur les risques réels, fondée sur des analyses médicales et scientifiques rigoureuses et robustes.
5. Conclusion
Au terme de notre analyse, les indicateurs les plus importants que nous identifions pour la gestion de risque d’une épidémie sont les suivants :
- les cas de contaminations hebdomadaires doivent être mesurés par une stratégie de test de type “sentinelle” via les consultations des personnes symptomatiques auprès des médecins généralistes. Cette stratégie doit être éventuellement complétée par des sondages réguliers de la prévalence de la charge virale dans un ensemble représentatif de la population belge. Les seuils d’activité faible, moyenne et élevée des épidémies de maladies respiratoires peuvent alors être retenus : ces seuils sont respectivement d’environ 130, 500 et 800 consultations “symptomatiques” par 100 000 habitants par semaine.
- nous devrions appliquer les seuils définis par l’OMS entre les différents niveaux de gestion de risques, établis sur la base du nombre des nouvelles hospitalisations pour symptômes de COVID-19 par semaine et leur évolution. Ces seuils sont de 5, 10 et 30 pour 100 000 habitants.
- nous devons nous assurer d’une capacité de riposte suffisante définie principalement par une occupation des lits de soins intensifs. Notons cependant que la capacité de riposte hospitalière est une variable “policy-dependent” (dépendante de choix politiques) et fortement tributaire de l’implication ou non des niveaux de soins primaires (première ligne) dans la prise en charge des patients. De plus, cette capacité peut varier d’un pays à l’autre ou être adaptée avec le temps. Il n’est donc pas suffisamment représentatif de baser un baromètre sur des indicateurs relatifs. Un nombre de lits disponibles par 100.000 habitants serait plus représentatif qu’un pourcentage.
En conclusion, toute proposition de baromètre épidémique doit se baser sur des indicateurs fiables qui ne seront ni affectés par des erreurs potentielles ou des variations temporelles dans leur mesure et leur suivi, ni susceptibles de normaliser une situation pandémique (comme une vague de tests pcr positifs sans augmentation proportionnelle des hospitalisations) qui deviendrait artificiellement permanente du fait d’indicateurs peu appropriés aux plans sanitaire ainsi que dans une perspective de santé publique.
Afin d’éviter ces risques, nous avons souhaité souligner l’existence d’un baromètre existant et pertinent (celui de l’OMS), qui pourrait être associé aux outils de mesure et à l’expérience du réseau sentinelle. Cette combinaison d’outils offrirait un cadre de gestion et de contrôle objectif et efficient de l’évolution de la charge virale du variant omicron et de ses successeurs au sein de la population. Il permettrait en même temps d’engager une sortie de crise et un retour à une vie en société respectueuse des principes et des valeurs démocratiques.
Enfin, et peut être surtout, un baromètre ne doit en aucun cas être une loupe grossissante qui nous fait oublier la totalité de la réalité. En effet, cette pandémie est devenue “multi-facette” et génère bien d’autres souffrances et maladies que le seul virus (santé mentale, sédentarité, stress et anxiété, non diagnostic d’autres maladies, etc). Si un tel baromètre continuait à nous laisser voir la réalité uniquement par le prisme du covid, il deviendrait plus nuisible que bénéfique. L’objectif est d’œuvrer à la mise en place d’un pilotage juste et adéquat en matière de santé publique, non de conditionner l’ensemble d’une société à l’état d’un paramètre sanitaire parmi bien d’autres.
Signataires
Prof. Denis FLANDRE, ingénieur – systèmes biomédicaux, UCLouvain
Dr. Frédéric CARUSO, anesthésiste-réanimateur, ex-ULiège
Prof. Vinciane DEBAILLE, géochimiste, FNRS-ULB
Prof. David DOAT, éthicien, UCLille – UNamur (ESPHIN)
Prof. Jacques FOLON, droit, protection des données, Université Saint-Louis – ICHEC
Prof. Dr. Pierre-François LATERRE, soins intensifs, UCLouvain – Cliniques Saint-Luc
Dr. Olivier LHOEST, anesthésiste-réanimateur, Liège
Prof. Elisabeth PAUL, santé publique, ULB
Prof. Bernard RENTIER, virologue, ULiège
Prof. Olivier SERVAIS, anthropologue, UCLouvain
Prof. Jean-Marc SPARENBERG, physicien, ULB
Notes